C’était il y a tout juste 2 ans. Nous étions, ma conjointe et moi, allés rejoindre un couple d’amis qui séjournaient pour un an en Martinique (1–2–3).
Pendant notre séjour, j’ai fait la connaissance d’un gars fort sympathique, qui était devenu un ami du mien. Ce jour-là, il nous emmenait, mon ami et moi, sur la côte Est de la Martinique, dans le début de l’Atlantique, pendant que nos ‘blondes’ allaient visiter d’autres coins de cette fabuleuse île. Ce 26 mars 2008, c’était aussi mon baptême en catamaran. Un tout petit cata de 27 pieds, si ma mémoire est fidèle. Le rêve de ce navigateur chevronné et brave. Presque un peu fou… mais prudent quand même; après tout, il avait 2 enfants. En effet, fallait être presque fou pour aller chercher dans sa France natale ce catamaran et le ramener, seul, sur l’Atlantique, pendant ce qui allait finir par durer un mois, dont 3-4 jours de tempête effroyable à ne pas dormir, et 3-4 jours de calme absolu à faire du surplace. Les jours se suivent…
Mon ami et moi avons bénéficié des mêmes conditions au cours de ma journée-baptême.
Un premier quatre heures très intenses, avec des vagues de 15-20 pieds (4-6 m) qui vous brassaient le cata à en faire craquer le mat. Ça m’inquiétait, mais mon orgueil de mâle me dictait instinctivement de ne pas avoir trop l’air de m’en faire. De plus, je voyais chez Marc un calme olympien du gars qui en a vu d’autres, à moins que ce n’eut été un calme de canard: calme en apparence, mais qui pédale très fort sous l’eau. Marc barrait à gauche et à droite sur les crêtes de vagues, afin de favoriser une descente au creux de la suivante sans trop de casse, ou juste pour ne pas nous faire trop arroser. Ou saler, c’est selon !
(À preuve, nos lunettes fumées, juste après cet incroyable “trip” duquel j’étais ressorti les deux mains légèrement engourdies, à force de me tenir ici et là, sur les poteaux qui tenaient la structure au-dessus de nos sièges.)
Nous nous sommes ensuite réfugiés dans la Baie des Anglais, à l’abri de ces fouettants vents d’Est, le temps de reprendre notre souffle et un petit casse-croûte.
Puis, au retour, un vent moyen, mais régulier, de dos, qui favorisait le surf sur vagues. J’explique ce que Marc nous a enseigné ce jour-là:
-Tu places les deux coques perpendiculairement à la vague qui arrive, tu barres… et tu constates sur le GPS l’accélération foudroyante. (On doublait de vitesse: wow ! quelle magie !)
Bref, une journée inoubliable où se sont mélangés grandiose, sensation de petitesse infinie parmi les éléments naturels déchainés (mais si peu, au fond, quand on sait ce que Dame Nature peut faire de pire encore), crainte, confiance, joie, bonheur, vertige, faiblesse, force, exaltation, repos, éveil, stress, etc., sans oublier ces bons vieux gros rocks qu’on a entendus tout le long, que Marc chérissait et qu’il nous mettait plein gaz dans son système de sono 🙂 !
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Hier soir, mon ami essayait de me rejoindre pendant que je pratiquais de la musique avec un groupe vocal…
J’ai fini par lui téléphoner à la toute fin de la pratique.
HORREUR: Marc est décédé. Il n’avait même pas 40 ans ! Le cancer qu’il combattait depuis plus d’un an déjà a fini par le vaincre, malgré le dernier mois passé où finalement, Marc avait repris du poil de la bête. Un dernier soubresaut…
Les mots manquent devant ces choses. La seule phrase qui m’est enfin venue à l’esprit, une fois le choc initial encaissé lors du téléphone annonciateur, c’est la suivante: au moins, Marc aura eu la sagesse de ne pas attendre, dans son cas, pour réaliser son rêve le plus cher. Il l’aura vécu à l’image de ma balade inoubliable: intensité et brièveté…
La vie aura été trop courte pour toi, Marc. Pour nous aussi. J’espère que là où tu seras, tu feras un beau voyage… Ici, tes enfants et ta conjointe devront apprendre une chose extrêmement difficile: vivre avec l’absence, vivre avec le poids du deuil, sans possibilité d’oubli véritable.
Bon voyage, Marc !
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Quelques photos complémentaires :
La mer du retour: beaucoup plus calme que l’«inphotographiable» mer de l’aller…
Au loin: le rocher du Diamant et le Morne l’Archer
L’îlet Cabri et son phare: pointe Sud de la Martinique. Naviguer là requiert une expertise certaine… et un bon GPS !
Marc sortant de la cuisinette avec le café salutaire après les émotions fortes de l’aller…
Marc se préparant au retour à la Baie des Anglais.
La Baie du Marin, au retour…
Mes sympathie Sylvain. Depuis le décès de ma grand-mère je sais ce que c’est d’avoir un coup de fil comme celui-ci. Ça nous rend sans mot…
merci pour cet hommage à marc. merci de nous permettre de le revoir même a 8000 kms. merci a vous. marc tu resteras toujours dans nos coeurs.