Poésie collaborative

La page de ce midi ;-)Ce midi, j’ai eu l’occasion de reprendre une activité que je devais faire dans le cadre de la semaine de la poésie à mon école, activité d’abord annulée à cause d’une journée de tempête le 28 février dernier 🙁 !

L’activité consistait en une réunion de différentes personnes, élèves, profs et toute autre personne intéressée par l’écriture collaborative, personnes présentes physiquement ou en ligne derrière leur clavier d’ordi.

Pour ce faire, un outil de type EtherPad était utilisé (MeetingWords dans ce cas-ci). Seule ombre au tableau, les iPodTouch et iPad de ce monde ne peuvent utiliser ces «pages-logicielles-en-ligne», car il y a incompatibilité. Mais sinon, GoogleDocs peut aussi faire l’affaire pour ce type d’écriture, les couleurs individuelles en moins (pour reconnaitre très rapidement l’auteur de chaque ligne, mot, correction proposée, etc.)…

Ce midi, malgré les abandons de dernière minute de quelques participants pour diverses contraintes de temps ou de connexion (eh oui, ça arrive encore, ça, soupir !), nous nous sommes réunis, 8 personnes (4 ici à l’école: 2 élèves, 2 profs, et 4 personnes en ligne), pour décider une thématique, puis écrire un poème, et ce, en 45 minutes à peine !

Bien sûr, ce midi, nous avions l’interaction synchrone, mais la page utilisée pour la rédaction peut aussi être revisitée autant de fois qu’on veut, autant en mode synchrone qu’asynchrone, de sorte que d’autres personnes (ou celles de ce midi) peuvent ajouter a posteriori des propositions, des modifications, des strophes complètes si elles veulent, etc.

Une expérience enrichissante pour qui découvrait cet outil ce midi, mais aussi pour les désormais “plus vieux routiers de l’outil” comme mes 2 élèves et moi, qui nous amusions beaucoup 🙂 !

Les instructions et la présentation de l’outil est ici.

Le texte rédigé ce midi (et après aussi, pour les ajouts, etc.) est ici.

Bonne lecture ! (Utilisez le Time Slider pour revoir l’élaboration depuis ses tout débuts, ainsi que la fenêtre de chat (Appuyez sur “Load more history”) pour relire toutes les discussions qui se sont tenues pendant ces 45 minutes 🙂 !

Merci beaucoup à Monique, Nathalie, Alex, Annick, Richard, Chloé et Hana pour leur collaboration et leur participation, et merci aux autres qui compléteront 🙂 !

Premier ClavEd pour mes élèves

Le 23 février dernier, j’avais décidé de faire participer mes élèves à un ClavEd (Clavardage Éducation, une initiative de Christine Renaud, alias @mvc_enseignants sur Twitter).

Mon objectif était de leur «montrer», mieux encore «faire vivre», une des diverses façons d’intégrer les TIC, de réactiver une compétence conceptualisée auparavant avec eux: «Faire avancer le propos dans une discussion, en interaction», également, de «jouer» avec une bonne quantité d’informations, sélectionner, réagir, etc., mais j’avais peu de temps pour la préparation avec eux… C’est là qu’on voit que 6 périodes par 9 jours, ça passe beaucoup trop vite parfois !

Quelques semaines avant, mes élèves avaient été invités à se créer un compte Twitter en prévision de leur participation à l’événement. Quelques uns se sont créé un compte très rapidement… Par la suite, j’ai quelques fois renouvelé l’invitation… Quelques autres inscriptions de plus.

La veille de l’événement, j’avais prévu faire une discussion Twitter qui servirait de pratique, mais plusieurs élèves avaient oublié d’apporter leur appareil mobile pour l’occasion… J’étais un peu déçu de cela, surtout que les élèves ont rarement l’occasion de se servir de ces appareils dans les classes à mon école… mais j’avais quand même beaucoup d’autres petites choses à vérifier avec eux, dont la compréhension de l’outil Twitter pour ceux qui étaient nouvellement inscrits, soit la majorité.

Puis nous sommes arrivés au 23 février beaucoup “plus vite” que prévu, comme toujours, car on court tout le temps. (Les courses aux Olympiques, ça devrait être confié aux profs, ils gagneraient les médailles, à moins de tomber d’épuisement, mais ça, c’est une autre histoire…)

La veille du ClavEd spécial, j’avais aussi pris sur moi d’inviter des élèves de l’iClasse de Pierre Poulin et François Bourdon, question d’être sûr d’avoir assez d’élèves participants pour l’événement: une sorte de pressentiment peut-être…

Et le ClavEd eut lieu. Comme d’habitude, un sprint effréné, cette fois 800 tweets en 60 minutes: un record peut-être…, un sprint où la discussion s’élabore sur 2-3 plans de “replies” simultanés, etc. Une gymnastique que même certains habitués de Twitter ont du mal à suivre. Il est clair que j’ai alors manqué de temps, pendant le ClavEd, pour discuter verbalement avec certains élèves, surtout ceux qui n’avaient pas d’appareil mobile ou d’ordinateur à leur disposition: il aurait fallu que nous soyions deux profs ou que mes élèves soient plus habitués avec l’outil, ou mieux encore, les deux !

Résultat: j’ai des élèves qui ont quand même bien participé, surtout ceux qui avaient testé l’outil un peu plus que la moyenne de mes élèves. Les autres ont soit abandonné devant l’extrême rapidité nécessaire à la lecture, ou à la sélection d’informations, soit devant la maitrise déficiente de l’outil par manque de pratique.

Bref, nous avons pu par la suite faire un retour sur les points positifs et les grands points à améliorer pour favoriser une participation maximale à ce genre de discussion en ligne. Pour dégager certaines compétences à acquérir aussi. Pour prendre conscience qu’il n’existe pas seulement les notes (groupe qualifié d’«enrichi» pour qui les notes revêtent une importance parfois un peu trop grande !) et les examens qui les procurent, mais qu’il existe des apprentissages parfois plus importants dans la vie, etc.

Apprentissages aussi pour le prof: ne jamais présumer de la maitrise d’un outil par les élèves parce qu’ils vivent “dedans”. Tous n’ont pas un intérêt égal pour les technologies. Certains élèves ont parfois des préjugés face à ces outils, préjugés qu’on penserait plus présents chez les “plus vieux” dont je fais partie : par exemple, «les technos, ce sont des bébelles, des jouets, des gadgets où on s’amuse mais n’apprend pas», etc. Bref, j’étais plus “génération C” que certains élèves dans la classe ! Un constat que j’avais déjà fait, mais que j’avais peut-être un peu trop enseveli dans un recoin de ma mémoire 😉 !

Voilà donc ma synthèse personnelle des apprentissages réalisés lors de ce ClavEd qui fut un demi-succès selon moi. Je n’ai pas retrouvé pareils échos ailleurs dans ce qui s’est écrit sur ce ClavEd: je me suis senti le seul à éprouver cette impression que tout n’est pas au beau fixe, qu’il y a encore des améliorations à apporter, etc. Alors sans doute qu’une relâche est nécessaire ou bienvenue pour moi 😉 !

Bienvenue aux commentaires si vous en avez: ça va m’éclairer et m’aider à garder vivante mon obsession à toujours regarder les deux côtés d’une médaille, le plus possible, et à faire des nuances toujours nécessaires pour évoluer sainement, à mon humble avis…

NOTE: une synthèse a été écrite par les élèves du groupe sur une page de type EtherPad.

Clair2011 – Bâtir des ponts… à l’ère des réseaux !

LIENS: Fichiers Twitter: (Il en sera question plus bas, pour explications !)
-Les PDF en 2 fichiers:
le 1 (de 2-3 semaines avant la rencontre jusqu’au 27 janvier au soir)
le 2 (du 28 janvier au 7 février au soir)
-Les mêmes fichiers, en format “WebArchive” 1 et 2.

Mise à jour: lien vers la DéCLAIRation, un document collectif à continuer de rédiger par tous !

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Des élèves bâtissent des ponts…
Sylvain Bérubé - ©2011

Clair2011 ! Pour quiconque avait déjà vécu Clair2010 (et quelques autres moments forts, pour ma part, dont le Colloque Génération C du CÉFRIO, ainsi que Vers l’Éducation 2.0 en 2007), Clair2011 était un événement attendu et espéré. Jusqu’à la dernière minute, même si je faisais partie, à distance, du comité organisateur, je n’étais pas sûr de pouvoir y assister.

Finalement, j’y suis allé (en compagnie de Mario, François et Laurence – quelles conversations pendant 3h30 à l’aller et autant au retour !) et j’ai pu, une fois rendu sur place, faire la rencontre de gens avec qui j’échange déjà sur le Net, et d’autres aussi, question d’élargir ma sphère collaborative 🙂 !

Si j’avais à résumer Clair2011, je dirais que toute la fin de semaine s’est déroulée sous le signe de la collaboration, une collaboration qui devient de plus en plus nécessaire chaque jour… J’y reviendrai en conclusion !

François Guité, pendant sa présentation
Sylvain Bérubé - ©2011

Jeudi soir, François Guité nous a ébloui avec sa conférence d’entrée en la matière: il y abordait la rapidité des changements que nous vivons et les répercussions pédagogiques inhérentes à ces transformations, à ces révolutions et à l’accessibilité et la multiplication exponentielles des savoirs en tous genres… Le tout présenté avec l’esthétique et le soin incomparables que l’on connait ( ou qu’on se doit de connaitre) à ses présentations. Un beau moment pour démarrer la réflexion et favoriser et enrichir les échanges tout au long des activités qui allaient suivre.

Sylvain Bérubé - ©2011

Vendredi, Sébastien Paquet nous entretenait de la nécessité de la collaboration ouverte pour pouvoir préparer l’avenir dès maintenant, car c’est aujourd’hui qu’on bâtit la société de demain (Le Prezi de Sébastien est ici).

Il était suivi en soirée par Daniel Peraya, @plienad sur Twitter, le conférencier principal, qui disait en gros que l’enseignant qui veut intégrer les TIC n’a pas le choix d’innover, avec tout ce que ça implique de remises en questions, de réflexions sur ses pratiques et d’évolution professionnelle (J’ai l’impression d’avoir entendu en théorie, ou en mots, ce que je vis depuis les dernières années…)

Laurence Juin, pendant sa conférence
Sylvain Bérubé - ©2011

Comme dernière conférence du colloque, Laurence Juin venue directement de la région de La Rochelle en France nous parlait de l’expérience Twitter qu’elle vit avec ses élèves depuis quelque temps, de ce que ça apporte en terme de motivation à des élèves “ordinaires”, des transformations des pratiques aussi. Une prof dans le feu de l’action… Ce que j’ai bien aimé de cette conférence, c’est que Laurence, qui se définit comme non-techno, a quand même su intégrer des pratiques techno à sa pédagogie, pas juste utiliser des technos au hasard.

Mais par-dessus tout, Clair2011, ce sont ces élèves du CAHM qui, avec le personnel qui y oeuvre et nous accueillait de façon absolument extraordinaire, nous parlait de ce qu’ils apprenaient, de ce qu’ils faisaient comme projets, etc. Ce contact privilégié avec ces élèves nous permettait de nous plonger dans le même “bain pédagogique” qu’eux, de vivre avec eux ces projets, ces apprentissages. Il était vraiment intéressant, par exemple, de voir les jeunes apprendre moult choses aux “plus vieux” que nous sommes !

Sylvain Bérubé - ©2011

Clair2011, c’est aussi un samedi passé en ateliers de type “barcamp” (non-conférence), où chacun des participants peuvent s’enrichir les uns les autres dans un climat de collaboration qui devrait servir de modèle à quiconque est encore tenté, en 2011, de développer “en silo” comme au temps de l’époque industrielle…

Le ClavEd sur mon iPod Touch
Sylvain Bérubé - ©2011

Parallèlement à tout cela, Christine Renaud (sous le chapeau MVC_Enseignant sur Twitter) a tenu un ClavEd (un clavardage d’éducateurs sur Twitter) spécial à Clair2011 le vendredi midi (au lieu du rendez-vous hebdomadaire du mercredi): de belles discussions ici encore, avec des gens sur place, mais aussi de l’extérieur. Lors de ce ClavEd, Christine a aussi tourné quelques petites vidéos placées ici.

Anecdote: j’ai enfin pu mettre des mots sur ce que je ressens face aux usages de Facebook vs Twitter: Facebook, c’est “m’as-tu vu” alors que Twitter, c’est “m’as-tu lu”: ce qui explique le fait que, sur Twitter, on a plus d’échanges d’idées que sur Facebook. Bien sûr, bien du bruit est généré par ces deux réseaux, mais on choisit toujours de filtrer de la façon qu’on veut, non ? 😉

Backchanneling Twitter, diffusé au gymnase en permanence
Sylvain Bérubé - ©2011

Parlant de Twitter, la société Iteractive a étudié le nombre de tweets écrits pendant le weekend Clair2011: en 3 jours, plus de 3600 tweets faits par 334 “twitteurs” uniques (avec environ 190 personnes présentes physiquement sur les lieux). C’est environ 3,5 fois plus que l’an dernier, autant pour le nombre de tweets que pour le nombre de twitteurs: j’imagine que c’est entre autres parce que plusieurs n’en étaient plus à leur premières armes dans le domaine des réseaux sociaux et qu’ils ont plus profité de l’outil pour réfléchir et échanger pendant les conférences mêmes, etc.

Pour ma part, j’ai recueilli, à la main (les compilateurs de tweets sont rarement-jamais fiables à 100%) tous les gazouillis qui ont été faits à partir de quelques semaines avant l’événement jusqu’à une semaine après Clair2011… Au total, plus de 4800 tweets réunis ici en 2 documents PDF (liens dans le haut de ce billet) ou en 2 documents de type WebArchive (HTML cliquable) (liens dans le haut de ce billet). La division en 2 fichiers s’explique par le fait que mon logiciel pédalait trop fort, une fois dépassé les 450 pages de 5-6 tweets chacun !

Au final, ce que je retiens, c’est l’importance de bâtir des ponts en cette ère des réseaux sociaux. Il faut donc favoriser les rayonnements d’initiatives du genre et viser le plus possible à éviter les silos. Briser l’isolement et favoriser la collaboration la plus franche possible doit devenir le leitmotiv de l’éducation, car sinon, on ne préparera pas les jeunes à l’avenir, mais au passé de l’époque industrielle, ce qui serait un non-sens en soi !

Alors maintenant, go ! Nous avons beaucoup de pain sur la planche !

En terminant, quelques autres photos qui parlent souvent par elles-mêmes 🙂

Réforme - innovation - …
Sylvain Bérubé - ©2011
Réforme, innovation et énovation… et énovation
Sylvain Bérubé - ©2011

Atelier sur l’écriture collaborative, animée par Nathalie Couzon et votre humble serviteur

Notes ici. Notes des autres ateliers disponibles à partir de cette page.

Atelier sur l'écriture collaborative

Des élèves, en plein samedi, s’étaient aussi jointes aux ateliers, dont le nôtre !

Aterlier sur l'écriture collaborative

La conclusion de la conférence de Laurence Juin

Sylvain Bérubé - ©2011

Le gymnase de l’école CAHM, rendu méconnaissable et devenu une véritable salle de conférences et d’échanges !

Des élèves partageant leurs activités d’apprentissage avec les visiteurs sur place

Sylvain Bérubé - ©2011

Des élèves qui twittent et co-construisent leur réflexion pendant les conférences

Sylvain Bérubé - ©2011

Tableaux des changements, présenté par François Guité

Sylvain Bérubé - ©2011

Et enfin, une phrase-choc, tirée de la conférence de François aussi !

L'éducation saura-t-elle intégrer les TIC ?
Sylvain Bérubé - ©2011

300 heures de géographie ! – par Jean Desjardins

Jean Desjardins est un prof d’histoire et de géographie à Montréal. Il voulait réagir à des propos tenus sur les ondes par Marie-France Bazzo et Mario Dumont, lors de leur chronique au 98,5 FM, à l’émission de Paul Arcand. Et comme il voulait publier ses propos, je lui ai offert un espace ici 🙂

Quand on prend un pan du Programme de formation de l’école québécoise et qu’on le confie à l’ensemble des profs sans spécifier outre mesure comment, il arrive généralement qu’au final, personne de s’occupe plus de cet aspect de la formation de nos élèves. Ce principe se vérifie souvent dans bien des domaines. Est-ce réellement le cas en géographie comme le sous-entendrait Marie-France Bazzo ? Est-ce qu’il faut se borner à compter les heures de géographie? Jean Desjardins entend bien nous prouver le contraire à l’aide des Programmes eux-mêmes. Bonne lecture !

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Dans un article du 3 février, La Presse coiffait l’article d’Ariane Lacoursière du titre «La géographie: une matière en voie de disparition? ». Le lendemain, Marie-France Bazzo et Mario Dumont dans leur chronique chez Paul Arcand s’appuyaient sur le papier de Mme Lacoursière, mais sans point d’interrogation aucun dans leur propos. J’entends rassurer madame Lacoursière et contredire madame Bazzo et monsieur Dumont: on n’enseigne pas moins la géographie au secondaire.

Sitôt en présence de mes élèves du cours Monde contemporain que j’enseigne, je me suis souvenu de la chronique. J’y suis donc allé d’un tweet pour rappeler à madame Bazzo qu’elle s’exprimait sans avoir lu les programmes d’étude. Il faut en effet en comprendre l’articulation pour savoir que la géographie est aussi abordée de façon interdisciplinaire. J’imagine les journalistes sourciller devant la transversalité de la chose! Transversalité, le mot est lâché. S’ils se moquent, c’est par manque de connaissances et par préjugés, car c’est un plus pour la discipline qui gagne peut-être même en heures d’enseignement plutôt qu’en perdre.

Depuis que le renouveau pédagogique a atteint le secondaire, il est vrai que les 200 heures attribuées à la géographie sont devenues 150 tel que le rapportait la journaliste Lacoursière. Cependant, les connaissances de géographie physique ont été ajoutées au cours de science et technologie sous l’appellation « terre et espace » (premier cycle: ici; deuxième cycle: ici)! Cela laisse aux enseignants de géographie 150 heures pour plonger très profondément dans l’étude des territoires en géographie humaine. En cinquième secondaire, s’ajoute encore le cours Monde contemporain. En trois des cinq thèmes (population, richesse et conflits), les 100 heures dudit cours ouvrent sur de grands pans de connaissances géographiques comme je le tweetais à madame Bazzo. Peut-on alors parler d’une réduction des heures d’enseignement de la géographie? Il y a tout lieu de croire au contraire!

Mais tentons l’expérience. Dans cette chronique, Bazzo raconte le cas du neveu montréalais d’une amie de son conjoint (on ne précise pas son âge) qui ignore où se trouvent les Laurentides. Pourtant, dans le programme de géographie, un des territoires à l’étude est une région touristique du Québec ou du Canada. Puisque Montréal est déjà à l’étude obligatoirement en tant que territoire métropole et Québec à titre de territoire patrimonial, les manuels ont pour plusieurs arrêté leur choix sur la région du mont Tremblant. C’est vrai que le choix d’une région touristique pourrait être la Gaspésie ou le Saguenay-Lac-Saint-Jean, mais vu que l’esprit du programme incite aux comparaisons, un.e enseignant.e consciencieux qui privilégie l’étude du Rocher Percé ou du fjord du Saguenay mentionnera certainement les autres pôles d’attraction touristique du Québec en les localisant.

Le second exemple amené par Marie-France Bazzo est la compréhension nécessaire de la géographie pour comprendre les enjeux de la mondialisation. Si celle-ci avait davantage de personnes convaincues par la réforme dans son entourage, on lui dirait que « les multinationales et leur déplacement vers des pays en développement » est la connaissance prescrite par le programme pour fonder la compétence 3 lors de l’étude d’un territoire industriel du Québec ou de l’Ontario des Grands Lacs. La dimension géographique de la mondialisation est encore approfondie par les thèmes de population et de richesse dans le cours Monde contemporain de secondaire 5. En histoire de secondaire 2, lors de l’étude des réalités sociales de l’industrialisation et de l’expansion du monde industriel (voir ici), on avait déjà eu l’occasion de faire l’histoire des puissances industrielles du 19e siècle et de leurs empires coloniaux jusqu’à la colonisation de l’Afrique.

Jamais ai-je appris autant, de mon temps!  Le cours de secondaire 1 était presque entièrement consacré aux connaissances de géographie physique que les cours de science et technologie aujourd’hui dispensent (la Terre dans l’univers, la formation du relief terrestre, le dynamisme interne de la Terre, la météorologie). J’adorais être l’enseignant qui faisait découvrir ces contenus, mais je me souviens encore de mon émerveillement quand je lus les programmes tellement plus riches et pas moins complets grâce au concours des collègues de science. Quant au cours de secondaire 3, détesté des professeurs et des élèves pour son caractère répétitif, il comportait une liste de régions administratives, de forêts et de cours d’eau à mémoriser. Qu’en gardent les Québécois aujourd’hui? Est-ce que le nombre d’heures consacré à l’étude de la géographie a diminué? Je crois le contraire!

Les derniers exemples que madame Bazzo mentionne sont les besoins en eau des États-Unis qui les font convoiter notre richesse, ainsi que la densité de l’occupation de la vallée du Saint-Laurent pour comprendre l’opposition des citoyens à l’exploitation des gaz de schiste. Dans le cas de l’eau, le thème de l’environnement dans le cours Monde contemporain porte entre autres sur la gestion de la rareté des ressources. En géographie au premier cycle, l’élève avait déjà étudié les aménagements que la Californie agricole a dû faire pour étancher sa soif, en guise de comparaison avec le milieu agricole de la vallée du Saint-Laurent prescrit au programme de géographie comme territoire agricole national. Il s’agit aussi bien sûr du principal espace géographique des cours d’histoire nationale de secondaire 3 et 4! La deuxième réalité sociale de secondaire 3 porte spécifiquement sur l’émergence d’une société française en Amérique, la Nouvelle-France. L’élève doit être ainsi à même de comprendre pourquoi les abords du Saint-Laurent sont encore les plus peuplés aujourd’hui.

« On est des citoyens plus endormis si on ne connaît pas notre géographie » affirme  madame Bazzo. On sera là-dessus parfaitement d’accord avec elle. C’est vrai aussi qu’on connaît assez mal notre géographie, au Québec comme en Amérique du Nord, et qu’il faudrait y remédier. Je pense avoir toutefois fait la démonstration que l’élève québécois qui développe une compétence à comprendre les enjeux de géographie le fait sur la base des connaissances que madame Bazzo elle-même juge pertinentes. Oui, et pas moins qu’avant, on enseigne aujourd’hui la géographie!

Jean Desjardins, M.A. Histoire, @profenhistoire sur Twitter